Sénégal - Présidentielle 2024 - Une Transition dans la douceur ?

L'ancien président Macky Sall (à droite) et son successeur Diomaye Fall

Après de longs mois d'incertitude quant à la tenue du scrutin présidentiel, le Sénégal a honoré sa tradition de démocratie africaine. Le chemin n'a pas été des plus faciles. Mais le cinquième président depuis l'indépendance du pays en 1960, Diomaye Faye, a été investi le 02 avril 2024 (deux jours avant la fête de l'indepédance), et la transition avec le président sortant Macky Sall s'est faite dans un climat apaisé. Ce qui n'est pas gagné.

Retour sur les événements qui ont amené au pouvoir ce jeune président de 44 ans, et les défis qui l'attend lui et son équipe.

Deux années de tensions aux extrêmes

Jusqu'aux derniers moments on a pu douter de la tenue des élections présidentielles, surtout quand un samedi de février, à trois semaines du scrutin, le président Macky Sall est apparu à la télévision pour une brève allocution et annoncer le report des élections sine die. Bref, à une date ultérieure, sans préciser quand ! C'était l'énième péripétie d'un cycle de violences et d'actions judiciaires. 

Sonko, l'opposant

Ousmane Sonko

Car depuis deux ans le Sénégal vit au rythme après que le principal opposant Ousmane Sonko (49 ans et maire de la ville de Ziguinchor en Casamance), a été impliqué  et poursuivi en justice dans une affaire de moeurs risquant de le priver de sa candidature à la présidentielle. Manipulation de la justice pour ses partisans, jeunes pour beaucoup qui n'ont pas hésité à descendre dans la rue à chaque rebondissements de l'affaire. En juin 2023, on a pu compter une trentaine de morts suite à ces manifestations, et à la représssion des forces de l'ordre. 

Et donc en février après l'annonce de Macky Sall, et les nouvelles manifestations, on pouvait craindre le même cycle de violence.

Et même si, le président sortant avait annoncé en juillet dernier, suite aux événements de juin, son intention de pas se représenter, le climat en restait pas moins explosif.

Il n'est pas rare en politique que les ennemis d'hier deviennent non pas les amis d'aujourd'hui mais finissent par se serre la main. Pour la photo du moins. En tout cas, on peut apprécier que la transition, ce soit faite dans la douceur, ce qui n'était guère gagné d'avance.

Diomaye Faye, le plan B

Rien ne prédestinait Diomaye Faye à devenir président de la République du Sénégal. Il y a encore quelques mois. C'était le fidèle un des fidèles de Sonko, son second, qui lui aussi est allé en prison, dans le cadre de leur combat (condamné pour diffamation d'un des ministres de l'ancien gouvernement, il n'est sorti de prison que quelques semaines avant les élections). Rendu inéligible, Sonko ne pouvait pas se présentait à ce scrutin. Les deux hommes ont donc fait un deal pour les élections de mars 2024. Un deal gagnant, puisque que leur mouvement Pastef a gagné avec 54% des voix au premier tour. 

Les défis de la nouvelle présidence

Le duo Faye et Sonko est à présent au pouvoir, le premier comme président, le second comme premier ministre. Et la tâche qui les attends est colossale. Surtout, ils vont devoir être à la hauteur des attentes créées auprès de tous ceux qui les ont soutenu et qui ont cru en eux. Ils ne peuvent pas décevoir.

Les chantiers qui les attendent sont vastes: conforter si ce n'est rétablir l'Etat de droit, s'attaquer à la question du chômage des jeunes, gérer la rente des pétrolières et la redistribuer à tous, développer un système éducatif digne de ce nom... Et sortir de franc CFA, comme promis ? C'est une promesse forte à laquelle beaucoup de leurs partisans et électeurs semblent attacher. Est-ce réaliste en l'état ? C'est peu probable.

C'est Hilary Clinton qui disait, de mémoire, au sujet de Barack Obama après son investiture en 2008, que "On fait campagne vers, on gouverne en prose". Il semblerait que ces mots s'appliquent au nouveau duo à la tête de l'Etat sénégalais.