Une Semaine en Apnée... 04 - 10 juin 2018



Une semaine tout en points d'interrogation sous fond de temps incertain, et de musique...

Lundi 04 :

Le jour d’après... D’après ce passage éclair à Montpellier, et cet enterrement de vie de garçon, dont j’ai aimé les rencontres.  Mais je suis quelque peu vidé. Oui fatigué et groggy mais je m'en vais donner mon cours...

À l'aller, à vélo, cette pensée : renverser la table. Mettre à bas ce système dont plus personne ne veut plus. Grèves, manifestations, boudages des urnes... D'accord ! Le constat on le connait. Mais pour mettre quoi à la place ? Et c'est bien là que ça bloque. Nous n'avons aucune idée de ce que ce plan B pourrai être. Le mur, à l'est s'est effondré, et avec l'utopie communiste... La nature ayant horreur du vide, le chaos, est certainement ce qui pourrait suivre, et personne n'en veut. Mais cela ne doit pas nous empêcher de penser une alternative crédible. Ou tout simplement laisser la nature faire son chemin ? Je roule...

Mardi 05 : 

Ma future stagiaire qui va m’aider à promouvoir mes livres me confie lors de notre premier rendez-vous ses difficultés à trouver un simple job étudiant. Plusieurs fois, elle a été tout prête d'une réponse positive, mais au moment d'annoncer son statut, elle dispose juste d'un de séjour, la réponse a tourné au négatif. Elle est algérienne, présente bien, plutôt bonne élève sérieuse, une fille de son temps, coquette et sans fard. Mais du coup elle est obligée de ruser, et passer par le statut d'auto-entrepreneur ! Hallucinant !

Mercredi 06 :

Une journée lourde et instable comme à peu près toutes celles de ces derniers jours. La pluie, les orages, et le soleil qui revient par intermittence...
Pourquoi les Français sont ils si jaloux, et mauvais entre eux ? Toutes couleurs, et origines confondues. Bien sûr il est des gens bien, beaucoup, mais il persiste une forte tendance à la négativité. Ce que j'appelle ce "mal français" et qui vient de loin. Et surtout cette jalousie. "Ce mal français" qui relève de la psychologie sociale, trouve ses profondeurs dans notre histoire. Et dans ces traumatismes du 20ème siècle : la Grande Guerre, la deuxième, les décolonisations... Et surtout la manière dont nous nous les sommes racontés cette histoire, ou pas d'ailleurs, en nous mentant le plus souvent, à profondément influer sur la psychologie collective du pays. C'est ma thèse, j'y reviendrai.

Mais aujourd'hui, dans le bus, c'est une femme avec sa poussette de s'écrier : "À quel point les gens sont aigris et pas sympas !". Un détail ? Scène de la vie quotidienne... Il m'arrive moi-même de ne pas être tendre, intérieurement avec ces femmes avec ces gros engins. Mais je crois qu'elle a raison, surtout à Paris, du moins, où les gens oui ne sont pas sympas, voire méchants.

Je retrouve ces jours-ci, le plaisir de la lecture, dans les transports, et le soir avant de m'endormir. Et celui de jouer quelques notes de musiques sur ce clavier très basique que je ressors. Quelques airs de pop, joués par un amateur, les doigts hésitants. Mais c'est agréable de produire soi-même ces sons, et de les entendre sonner justes.  

Jeudi 07 : 

Yoga quasi tous les jours. Respirer, oui respirer. Et ça me fait du bien. Même si cela me place dans ma bulle. Je regrette qu'aussi peu de mecs en pratiquent.  Dû à cette image fausse ? Celles de mamies, ou de bourgeoises qui tentent de combler leur temps libre, en se tapant au passage leur professeur... Les clichés ont la vie dure !
Il faut plutôt y voir un chemin intérieur, une découverte de soi. Tout en restant extrêmement physique, si on le veut, ou doux, si on le choisit. À chacun son yoga.  Mais toujours respirer, et sortir de l'apnée quotidienne. Mais je suis dans ma bulle.  Lire, écouter de la musique, en jouer un peu...

Vendredi 08 :

On me reprocherait de gâcher mon potentiel ! C'est d'un avis commun. Ce sont les mots d'un ami à qui j'évite de répondre pour ne pas être trop violent en retour. Certains oublient, que jusqu'ici j'ai publié deux livres, de prochains arrivent. Jusqu'ici, j'ai fait ce que j'ai pu, seul, sans rien demander à personne.
Désormais j'ai pris le parti de ne plus écouter ces critiques qui ne font pas avancer. Et j'ai plutôt tendance à regarder le verre à moitié plein. Pas d'autosatisfaction, mais pour le moment je n'ai pas à "rougir". Et puis, n'est-ce pas à la fin du bal que l'on paie les musiciens ? Il me reste donc quelque temps, je l'espère, pour jouer ma partition. Sinon, resteront les quelques lignes que j'ai écrites.

Ce soir, je déroge à la règle fixée en début de semaine, et j'engloutis en une nuit quatre épisodes de la saison 2 de "Marcella", cette série anglaise dont la saison 1 m'avait plus que convaincue. J'aime les séries britanitques Spooks, Downtown Abbey, Line of duty... Elles sont bien plus proches de la réalité que celles de mes compatriotes.

Simone de Beauvoir entre à la Pléiade, par ses mémoires. Cela n'est que justice. Mais après Sartre. Toujours deuxième après Sartre, comme à l'agreg en 1929 ! A-t-elle un intérêt à être lu en 2018, elle qui entrepris de faire  de "son entreprise de vivre" son oeuvre. De se raconter sans fard... Quand on sait, avec les témoignages, sa correspondance, ce qu'a vraiment été sa vie... Je crois  tout de même que l'intérêt demeure, et pas seulement pour les féministes, Elle n'a pas tout dit, notamment sur ces relations avec les femmes. Mais elle bien plus complexe. J'y reviendrai

Je me dis qu'il est impossible, dès lors qu'on écrit sur soi de ne pas parler de sa sexualité, si on veut être complet. Sans être freudien, je crois que c'est souvent la clé, du moins l'une essentielle pour comprendre quelqu'un. Il me faudra passer par là. Trouver la bonne distance entre la totale exhibition de soi et la sincérité. Un peu trop tôt pour cela, pour tout dire... Mais un jour viendra....

Samedi 09 :

Je me replonge dans l'oeuvre de Cheick Anta Diop, cet africanisme qui a inlassablement consacré sa vie, à relever la tête des africains, et à replacer l'héritage historique de ce continent dans sa longue tradition depuis l'antiquité. Pour nous rappeler  aussi que cette histoire est riche, et ses apports multiples. Comme un devoir pour ma part, de me relier à cette histoire qui est aussi la mienne, et que je connais trop mal.

Comme une madeleine de Proust... C’est une musique qui fait office d'éveil de la mémoire. Une chanson que je n’avais pas entendue depuis fort longtemps. Samedi soir, Gif, une voiture passe, au son de fortes basses. Je reconnais l'air de ce début de chanson. UB40,  GroovinOh que oui, cela remonte à loin ! Aux années lycées, aux amours, les premiers, les booms, des soirées plutôt. Les rêves d'adolescents, l'exaltation avant l'entrée dans l'âge adulte. Oui j'ai été un adolescent exalté, intérieurement du moins. Et surtout comment en sommes nous arrivés là ? Moi qui pensais que nous étions, ma petite bande, si particuliers. La vie ? Qu'avons nous fait de ces rêves, de nos promesses d'adolescents ? Cela a-t-il un intérêt de se poser la question. Certaines, beaucoup, ont eu des enfants, ont fondé une famille. Cela suffit dit-il ?

Paysage lunaire après la pluie dans ma petite ville, et je guide trois jeunes à scooters perdus, dans cette lointaine banlieue semi-bourgeoise.  Je me dis que vu leur dégaine personne le fera. Ils me suivent un bon bout de chemin, moi à vélo, puis je rentre.

Dimanche 10 :

Nadal remporte son 11ème titre à Roland Garros ! Quel champion ! Décrié par beaucoup, certes, mais je l'aime bien ce type. Pour sa détermination. Pour sa virilité brute et intelligente. Et parce qu'il est espagnol ?  Sans doute. Bien que je reste persuadé que l'excès de compétition dénature le sport, et surtout déteint sur le reste de la société. Mais c'est l'époque... 

Le soir, je regarde sur Netflix le documentaire "fluctuat nec mergitur" consacré aux attentats du 13 novembre 2015 à Paris. Chacun d'entre nous se souvient où il était cette terrible nuit. J'étais à Barcelone, et après avoir bu un verre, comme souvent avec mon ami italien Mass, je suis rentré tôt chez moi. Peu après, vers 22h00, il m'a envoyé un message pour me demander :"Tu as vu ce qui se passe à Paris". J'en ai pas cru mes yeux. Le reste est histoire...

Le documentaire prend le parti, de manière chronologique, de donner la parole aux acteurs de cette nuit. Beaucoup de survivants, des pompiers. On repasse par le stade de France où se jouait France - Allemagne, le Petit Cambodge, le Carrillon, la Belle Équipe, le Comptoir Voltaire. Et... ? Et le Bataclan.
En trois partie, la deuxième et troisième étant consacrées au Bataclan. Sans doute les moments les plus forts de la série. Témoignages de ceux qui furent dans la fosse, et durent faire les morts, tout en continuant à se faire carnarder dessus. Plus haut, dans les balcons,  ceux qui se cachèrent, ou qui furent pris en otage jusqu'à l'assaut finale. Le mérite de cette série documentaire, avec une certaine sobriété, est de nous faire revivre cette nuit, avec l'avancement de stupeur qui pris de cours tout la France, jusqu'aux plus hautes autorités.

J'ai aussi le sentiment, au fur et à mesure des témoignages, que les femmes ont été plus courageuses, intérieurement. Ou plus fortes. Je garde la phrase de l'une d'elles :  "Ce sont des brêles, je ne vais mourir tuée par de telles brêles !". Emotions; un peu trop ? Mais les témoignages de cette nuit macabre serrent le coeur.

En refermant mon ordi, à la fin, j'ai cette pensée : quelles seraient notre perception si des Irakiens qui ont vécu pendant deux décennies sous un déluge de bombes américaines, des Palestiniens, ou encore des Africains du Sud Soudan ou des Grands Lacs en proie à d'incessantes guerres civiles, nous livraient les affres de leurs vies dans des documentaires ?  Cela changerait-il la manière dont nous intervenons dans ces pays ?

Je pars me coucher. Non sans me dire qu'il va falloir sortir de ma bulle, bien que cela soit aussi la condition que pour je puisse écrire, créer. Mettre de l'ordre dans ma vie, sortir de ma bulle, pas le choix en fin de semaine, le Mondial commence !

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